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Allemagne

  • L'avion de Stockholm ! (3)

    AEROPORT FANTÔME

    Notre avion de Stockholm atterrit à 22 heures dans un curieux aéroport. Tout est noir. Cela me rappelle les petits aéroports de poche que j’ai découverts il y a vingt ans dans l’Afrique profonde.

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    Une vingtaine de passagers débarquent sur un tarmac désertique longeant une dizaine d’immeubles qui n’avaient rien à faire dans un aéroport. Y a-t-il erreur d’aéroport ou un curieux détournement anonyme ? 600 mètres à pied pour arriver enfin à un hangar de tôle ondulée faisant office de douane et de police. Une queue taciturne se forme devant un policier en uniforme vert. Cet officier que le sourire n’a jamais effleuré laisse distraitement tomber son stylo à bille pour dévorer des yeux une plantureuse blonde au frêle chemisier écru. Comment fait-elle pour supporter un léger 4°C avec cette tenue ?

    Soudain, une lumière au bout du tunnel

    Notre ami architecte nous accueille avec un large sourire. Je ne peux oublier cette première impression d’une ville nocturne où se mêlent quiétude, angoisse, incertitude, incompréhension et une certaine tristesse propre à l’ancien bloc communiste. À minuit, avant même d’aller à l’hôtel, un tour en ville à pied s’impose. De vieilles Opel et Lada côtoient de surprenantes Mercedes classe S et les derniers modèles d’Alpha Roméo. À chaque sueur de front sa voiture gagnée !

    Majestueuses et différentes, ces maisons égrènent l’histoire du pays.

     Chacune arbore à sa façade quatre ou six siècles d’âge. Chacune conserve un parfait toit de tuiles rouges ou vertes et porte souvent une inscription gothique qui rappelle que Tallinn a été une des villes commerciales de l’Empire prussien. Ces ville de Hansa, dont Hambourg était le porte-étendard, furent la « route de la soie » de l’Empire. Hansa donna en outre son nom à la compagnie aérienne allemande Lufthansa. La banque, le restaurant et la boutique de jade emprunteront de même le mot « hansa » pour compléter leur enseigne et devenir par exemple « Hansabank ».

    Taani Linn ou la ville danoise

    Tacite, historien latin du Ier siècle ap. J.-C., parlait d’une peuplade sans doute disparue, les Estes ou Aestii. Sur une superficie de 45 227 km2 (environ la Suisse ) vivent 1,5 millions d’habitants. Tallinn, la capitale, arrive péniblement à 450 000 habitants. 1 520 îles et îlots parsèment les rivages de l’Estonie dans la mer Baltique. Saaremaa, la plus grande de ces îles, est le lieu privilégié des vacanciers estoniens. Pour les amoureux de la nature, ce petit pays, dont la température moyenne annuelle est de 5°C, offre 1 512 lacs dont ceux de Pepsi et Vortsjärv. Sur 3 794 kilomètres de côtes, chaque Estonien se sentira encore plus proche de la Finlande voisine, le pays de ses ancêtres Finno-ougriens venus de l’Oural, près de la Sibérie. Des ferry-boats de toutes sortes relient en deux heures Helsinki à Tallinn, distantes l’une de l’autres d’environ 85 kilomètres. Face à la mer Baltique, l’Estonie a une frontière russe à l’est et une lettone au sud. Depuis 1989, le russe cède le pas à l’estonien qui devient langue officielle, et la religion est dite de tradition luthérienne.

    Les Allemands et les Danois christianisent l’Estonie en l’an 1200

    Les seconds prennent la capitale du pays qu’ils rebaptisent, en 1219, Taani Linn ou « ville danoise ». Un siècle plus tard, les Danois vendront le nord de l’Estonie à l’ordre teutonique de Livonie. C’est la naissance des « Barons baltes », ces aristocrates chevaliers germanophones convertis au luthérianisme. La Suède arrive au XVIIe siècle et fait de ce pays une province où le roi Gustave II Adolphe fonde, en 1632, l’Université de Tartue. En 1709, Poltava d’Ukraine chasse les Suédois et s’installe en Estonie qui deviendra province russe. Peu à peu, le servage s’installe. Les serfs sont de langue estonienne et la noblesse reste de culture germanique jusqu’en 1855, début du réveil national.

    Quelque soixante ans plus tard, l’Estonie acquiert son autonomie et devient un état indépendant en 1918, à l’heure où la Russie cède à l’Allemagne les trois pays baltes.

    Mais le corps allemand sera battu et l’Estonie placée dans la zone d’influence soviétique qui durera cinquante ans, soit jusqu’au 3 mars 1991, date de naissance de la nouvelle République d’Estonie qui adhérera à l’ONU six mois plus tard.

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  • Germany today

    Deutschland  2007

     .

    Sacré pays ! Sacrée nation ! L’Allemagne arrive à faire de ses produits d’occasion dits « second hand » des produits valorisés et recherchés. La troisième puissance économique de la planète n’est pas pour rien le premier exportateur du monde, devançant aisément les USA, le Japon et la Chine.

    Ce que l’Allemagne arrive et réussit à fabriquer est de si bonne qualité, que même d’occasion, il est encore recherché. Qui ne voudra pas d’une bonne Mercedes Diesel jeune de dix ans, d’une machine à laver Miel sortant d’une cave, d’un vieux robot de cuisine ou même d’une vieille machine à fraiser ? Le label « made in Germany » demeure le label de la grande qualité.

    L’Allemagne réussit aujourd’hui le pari du travail, de la qualité et de la rentabilité. Si les 35 heures de madame Aubry ont freiné la France , la demi-heure bénévole offerte par plus de 80 millions d’Allemands à leur pays est une manne sans prix. Au lendemain de la réunification des deux Allemagnes, il s’agissait en fait, d’avaler et de niveler quelques 18 millions d’Allemands qui vivaient à quelques années lumière de la sœur de l’Ouest. On décida alors d’offrir à son entreprise une demi-heure de salaire gratuit, pour aider le budget de l’État.

    Quel est donc ce curieux pays qui sort à peine d’une douloureuse guerre mondiale et qui est aujourd’hui le phare de l’Occident, la locomotive de l’Europe et l’espoir de tout un chacun ?

    Présenter l’Allemagne est un peu tenter la quadrature du cercle. Mission impossible. À mon avis, seule la langue allemande permettrait de comprendre le fonctionnement du cerveau des Allemands. Une langue où le verbe est chassé en fin de phrase, où les mots sont composés selon les besoins et où les modes se déclinent de maintes façons. Une langue dite de roc et de pierre qui pourtant, est la mère de la philosophie, de la grande musique, de la peinture et de moult arts. Une langue qui d’Internet et de l’informatique saisit toutes les nuances et les exploite au moindre détail. Une langue qui du détail en fait une religion pour instaurer l’exactitude en dogme vénéré. Dans ce pays, les mots « peut-être » et « inchallah » n’existent pas. Je répète souvent le vieux dicton allemand : « Eine Frau ist schwanger oder gar nicht schwanger, halbe schwanger gibt’s nicht » ou « Une femme est enceinte ou elle n’est pas enceinte, demi enceinte n’existe pas ». Cette rigueur de la langue est finalement le reflet de la société allemande.

    Les maux de l’Allemagne sont déjà pansés et lointains. Le souvenir de l’horrible seconde Guerre mondiale, menée par un autrichien germanisé et devenu allemand à l’âge de 32 ans, Adolf Hitler, est en voie de se déculpabiliser.

    Arrive le miracle allemand et la reconstruction du pays. Munich et Dresden, par exemple, détruites à 90 %, sont aujourd’hui, peut-être dans le Top 10 des plus belles villes d’Europe. L’Allemagne est entrain de réussir un pari extraordinaire pour digérer ses crimes de guerre, les comprendre, les accepter et les exorciser, pour pouvoir avancer. Depuis plus de vingt ans, les médias allemands rabâchent quotidiennement le crime nazi. Cette Catharsis freudienne n’abolit pas le crime, mais libère le sujet actuel d’un fardeau que l’on n’osait même pas évoquer…

    C’est ainsi qu’en politique étrangère, l’Allemagne s’affirme et se dédouane de son histoire.

    Au dernier sommet du G8 en juin 2007, en Allemagne, Angela Merkel a su persuader le président américain de reconnaître la nécessité de réduire « substantiellement » les émissions de gaz à effets de serre.

    D’autre part, les complexes allemands nés de la défaite de 1945 et de la Shoah se dissipent. On retrouve plus de 8 000 soldats allemands en Afghanistan, au Kosovo et au Congo RDC.

    Ce courage intellectuel a équilibré le citoyen allemand. L’ouvrier acharné, l’ingénieur invétéré ou le chirurgien dévoué sauront faire aujourd’hui la part des choses. Le travail est noble et nécessaire, mais la vie l’est tout autant. Sortez un lundi soir à Munich ou à Berlin, par exemple, pour aller dîner, il vous sera extrêmement difficile de trouver une table de libre si vous n’avez pas réservé. Imaginez cela le week-end… L’Allemand travaille d’une façon religieuse, consciente et consciencieuse dans son lieu de travail, mais il a appris aujourd’hui à se défouler. Imaginez une grande partie des îles espagnoles des Canaries réservée aux Allemands qui viennent se défouler jour et nuit, pendant une semaine. Imaginez 20 millions de visiteurs en 15 jours (plus du double de la Tunisie et près du tiers de la France en un an) qui viennent s’éclater à Munich pour la célèbre Oktoberfest, la fête de la bière. Loin d’une beuverie, cette fête se veut un hymne à la joie, à la vie, à l’amour, à la bière et surtout à l’amitié.

    En 2006, l’Allemagne affiche une balance commerciale excédentaire de plus de 170 milliards d’euros, contrairement à la quasi-majorité de la planète, qui est en déficit.

    L’euro fort (30 % plus cher que le dollar) ne freine nullement les exportations allemandes, contrairement au reste de l’Europe. C’est que le monde achètera le « made in Germany » à n’importe quel prix. La BMW  636 CS, la Mercedes nouvelle classe M, l’Aspirine allemande, le logiciel percutant, la locomotive qui porte le nom de Sir Diesel, aussi bien que le simple téléphone cellulaire ou les célèbres machines-outils, seront achetés les yeux fermés, dans l’ensemble de la planète, parce qu’ils portent le label « made in Germany ». Et qu’importe leur prix d’achat. L’acheteur est assuré de la qualité, de la durabilité et de la fiabilité des produits. Les grands marchés émergents, tels que la Chine , l’Inde et le Brésil remplissent très vite les carnets de commande de l’Allemagne. Angela Merkel continue sur la lancée de Gerard Schröder, en assurant, à près de 83 millions d’habitants, un PNB (Produit National Brut) par tête et par an de plus de 35 000 dollars.

    L’Allemagne doit, toutefois, faire face aux tensions sur le marché mondial de l’énergie et des matières premières. Près des deux tiers de l’électricité consommée en Allemagne proviennent de l’étranger, et principalement, de la Russie. Le pays importe 97 % de son pétrole, 83 % de son gaz et, curieusement, 60 % de sa houille. Ayant décidé d’abandonner l’énergie nucléaire (contrairement à la France ), d’ici à 2021, l’Allemagne tire encore 30 % de son électricité de ses centrales. L’environnement prime. Le charbon et le biocarburant (à l’instar du Brésil), tout comme l’énergie éolienne (comme le Danemark), se substitueraient à l’énergie nucléaire.

    Aujourd’hui, l’optimisme est de rigueur en Allemagne et la chancelière a réussi à imposer une image positive et ambitieuse de son pays, aussi bien sur le plan national qu’international. La croissance, l’innovation et l’emploi sont ses maîtres mots. Selon le journal français Le Figaro qui a donné le classement des cent femmes les plus influentes au monde, Angela Merkel arrive en tête, suivie de Condoleezza Rice. Bonne route madame la chancelière !

    Aujourd’hui et plus que jamais, l’Europe a besoin de l’Allemagne. Mais, n’oublions pas que cette force extraordinaire de l’Allemagne a besoin d’être canalisée et que la grande Europe peut être la plus belle aventure allemande.

    Bach, Beethoven, Schubert, Richard Wagner, Haendel, Richard Strauss, Bertolt Brecht, Karl Marx, Humboldt, Nietzsche, Einstein, Goethe, Diesel, Schiller, Kant, Hegel, Schopenhauer, Koch, Leibniz, Martin Luther, Thomas Mann, Von Braun, Max Planck, Ferdinand Porsche et bien d’autres génies allemands… invitent les lecteurs  d’Astrolabe à se remémorer la grande Allemagne, qui ne finira pas d’étonner le monde et d’apporter cette fois, d’une façon convaincante, son obole à la Paix du monde !

    Il serait enfin heureux, pour plus d’équilibre planétaire, que les cinq grands membres permanents de l’ONU, ayant un droit de veto, (États-Unis, Angleterre, France, Chine et Russie) accueillent un nouveau membre, l’Allemagne, tout comme peut-être le Japon et le Brésil.

    À leurs propres yeux, comme aux yeux de la planète, les Allemands redeviennent « Ein grosses Volk », un grand peuple comme les qualifiait déjà le Général De Gaulle.