Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Le Voyage, Le voyageur - Page 3

  • TSHIMPUMPU WA TSHIMPUMPU

    Entre garage bloqué

    et ambassade ouverte...

     Curieuse la vie ! A chaque matin sa gloire ou sa destinée !

    Hier n’est pas aujourd’hui et ne sera jamais comme demain… 

    joe-frazier-droite-amuse-avec.jpg

      Hier matin (disait Aznavour…) , je quittais paisiblement mon garage en reculant… Mais voilà pour la centième fois, cette année, que je ne peux quitter ma maison, car une voiture parquée en face, nous bloque le garage et empêche notre voiture de quitter le garage ! !

     Cela fait 18 mois que nous profitons de cette aubaine et ce don de Bouddha et de Jésus : notre charmante voisine, Sujet de sa très gracieuse majesté la Reine d’Angleterre a loué sa villa (face à nous) à un jardin d’enfants !

     Ni une ni deux ! La très charmante, avenante et gracieuse nouvelle Maitresse des lieux, rase tous les grands et petits arbres de ce jardin anglais pour y installer balançoires et béton à volonté !

    C’est ainsi qu’elle invita Sir Hitchcock à venir tourner un second épisode de son film : LES OISEAUX…

     Oui ! Oui ! Nous subissons depuis 18 mois (malgré un double vitrage) le bruit, les cris, les ballons et les hurlements (de 7h30 à 18h) de 150 jeunes enfants de cette garderie !

    Et cerise sur le gâteau, les 150 parents font 4 voyages par jour, soit environ  600 voitures qui viennent nous bloquer le garage !

    Furieux, je quitte ma voiture, me dirige vers la parente d’élève qui bloque notre garage et la prie de reculer un peu.  Je vois surgir… l’avenante et si cordiale source de tous nos maux, la princesse de Clèves ou Reine de Chaillot…No comment !

    Ce soir même, j’écris une 3e lettre à l’anglaise en lui disant cette fois :

    « Pardon d’avoir cru que vous alliez arrêter notre cauchemar quotidien dû à votre maison transformée en INFERNAL jardin d’enfants, à ciel ouvert, depuis près de deux ans!

    Pardon d’avoir cru que l’argent d’un loyer n’était pas supérieur à l’éthique, à la morale et au bon voisinage ! Pardon etc. etc. etc.…»

    Ni Mairie, ni Bouddha, ni prières, ni suppliques n’ont pu à ce jour faire de sorte que ce jardin d’enfants quitte ces lieux résidentiels ou se mute en « jardin d’enfants fermé » avec clôture antibruit ! Rêvons camardes !

     Ce matin ! Autre monde

     Waw, la voie est libre et je sors pour une fois facilement ma voiture du garage.

    500 mètres plus loin, au cœur d’El Menzah V je prends mon p’tt Capuccino en rigolant avec mes jeunes amis étudiants…

    En allant vers ma voiture face au trottoir opposé je m’aperçois que cela fait des années que je n’ai jamais pris le temps d’observer le drapeau de cette ambassade, devant laquelle je suis parqué !

    Wawww… la vie est belle, je prends un Astrolabe et me dirige vers la porte d’entrée en demander de rencontrer l’Ambassadeur !

    La préposée me pèse et soupèse du haut de son mètre soixante !

    Elle fait appel à un 1er sbire puis à un second…

    Ils n’osent pas me dire que je n’ai pas de rendez vous….

     Mais tout change rapidement quand je commence à leur narrer ma guerre du Rwanda avec ma douce fuite en stop vers le Lac Kivu pour aller en RDC Congo Kinshassa, représenté ici par cette ambassade à El Menzah V.

     Du coup j’ai droit à un p’tt café et à moult fou rires

    En deux minutes je traverse un premier salon avec des fauteuils en cuir noir, bien enveloppés par du plastique blanc ! En Afrique patron, faut bien faire attention aux choses !

     L’ambassadeur est en voyage et je suis reçu par son remplaçant et néanmoins Ministre- Conseiller LWLB qui est si heureux de me voir lui détailler le jardin de l’Ambassade de France à Kin, au Congo, où j’étais  invité pour le 14 juillet !

    Et à cet ambassadeur de France de m’expliquer dans son jardin :

     «  Vous voyez en bas de cette colline vous avez un fleuve et sur l’autre rive, c’est notre autre Ambassade de France, dans l’autre Congo, le Congo Brazza »

     

    En découvrant un WA sur la carte de visite de mon nouvel ami, je demande à son Excellence Monsieur Lukwsa Wa Lukwsa… ; des nouvelles de mon ami Cigéviste du Congo qui porte comme la particule WA (fils de )…

     Et c’est ainsi que j’apprends et bien en retard le dernier voyage de TSCHIMPUMPU WA TSCHIMPUMPU leur ancien Ministre des sports qui eu la fumeuse et courageuse idée d’inviter au Zaïre (RDC), pour un combat de boxe historique : FRAZIER CONTRE CASSUS ALI CLAY

     Mieux encore la mémoire cette sacrée machine me retrace un autre épisode :

     Nous sommes dans un des plus luxueux hôtels du Grand Duché du Luxembourg, réunis en Congrès mondial du CIGV…. En 1990.

    Le sérieux chef du Protocole et directeur du Parlement européen, et néanmoins président du CIGV Luxembourg Maurice Mestat ôte tout son sérieux, laisse tomber sa veste, en pleine soirée de gala et commence par former sur la piste de danse un cercle de 20 Cigévistes…

    On répète en chœur et sans savoir pourquoi avec une gracieuse mélodie, sur un air grivois… :

     «  Tshimpumpu wa Tshimpupu !  Tshimpumpu wa Tshimpupu !  Tshimpumpu wa Tshimpupu ! »

     Maurice passe au centre du cercle et sort 5 télégrammes et nous fait part du texte :

     -«  S.E. Tshimpumpu wa Tshimpupu a déjà pris l’avion Nr 01, puis 02, puis 03, puis le train, puis un taxi, pour venir au congrès CIGV au Luxembourg….. »

     Tsimpumpu wa Tshimpupu !arriva à minuit pile !

    RIP l’Ami ! 

  • Le coopérant français d’Hammam-Lif

    Oui, gamin prends la valise ! 

    Récurent. Envahisseur. Tenace et fugace, ce rêve revient au fil des années avec autant de couleurs et d’éclats.

    hammamLif01.jpg

    On dit que les rêves sont une réalité cachée. Peut-être ! Mais ce rêve récurant part d’un fait réel, qui a dû me marquer à vif pour revenir à flot 100 ans plus tard….

    C’était un beau palais bleu et blanc accroché à un flanc de colline et bercé par le mauve flamboyant d’une douce fleur dite cyclamen. Ce palais beylical grade toute sa majesté sur la grande route de la ville d’Hammam-Lif au sud de Tunis. Je ne sais par quel hasard ni pourquoi mon père y installa sa petite famille dans ce palais, à la sortie du Bey et à l’instauration de la république de Bourguiba.

     Je passais ma journée perdu dans les méandres de ma petite tête en train d’imaginer le monde et a le vivre dans cet immense palais ou j’avais droit à trois chambres (avec vue sur le Boukornine) pour garder et pavoiser mes collections d’un gamin de dix ans.

    Avec de la farine d’amidon je me suis fais une sorte de colle forte pour accrocher des centaines de dessous de bière cartonnés  dans une première chambre, et des centaines de paquets de cigarettes vides dans une seconde.  La troisième chambre fut mon doux refuge culturel avec des livres qui se chevauchent dans un parfait désordre… qui du reste n’a jamais changé.

     Impossible d’oublier ces nuits blanches passées à confectionner, tout seul, à coups de ciseaux et de crayons de couleurs, tout un jeu de Monopoly que mon père un jour refusa bizarrement de m’acheter. Des centaines de coupures de billets de banque et des dizaines de schémas d’édifices parisiens édifièrent mon empire d’enfant qui rêvait déjà de la conquête de la ville des lumières.

     Sortant un jour de ce cocon voyageur pour aller chevaucher mon fidèle « Rayon de soleil », mon précieux vélo jaune qui me permit des dizaines d’escapades lointaines au détriment de ma douce mère qui avait peur pour son petit parti si vite sur les pistes de la vie à souvent plus de cinquante kilomètres du gite familial.

     Soudain, face au palais (Dar El Bey), je m’arrête face à un homme. Je dépose mon vélo contre un poteau électrique jouxtant l’école primaire de monsieur Paulilo dont, plus tard (Merci Bouddha), la petite fille deviendra Membre du CIGV et néanmoins Ambassadrice du Canada.

    Sans me voir il me regarde. Du haut de son mètre soixante quinze il regarde ce moustique qui ose le toiser et lui proposer de surcroit ses services dans une courte phrase,  dans sa propre belle langue française:

     -« Monsieur, je vois que vous êtes étranger dans notre ville et que vous avez de la peine à porter vos trois bagages. Puis-je vous aider à porter l’un d’eux jusqu’à votre maison ? »

     -« oui gamin prends la valise ! »

     Etonné d’avoir eu le bagage le plus lourd à porter, du haut de ma petite carcasse j’affrontais l’avenue en tirant le baluchon noir et en oubliant toutes crampes et torsions à mes jambes et à mes mains.

    Cinq, dix, vingt minutes déjà. Un siècle peut-être. Un an je pense. Une éternité sûrement. Devant une petite villa blanche, le jeune Français qui s’avéra coopérant (prof de math) daigne s’apercevoir de ma présence et me lance sa seconde phrase de la journée :

     « Gamin, dépose correctement la valise devant la porte et Au revoir »

     Ni glaïeul, ni chrysanthèmes, ni oraison funèbre. Il ne s’est même pas demandé pourquoi je l’ai aidé. Il ne m’a même pas demandé quel nom je portais. Il n’a même pas remarqué mon regard interrogatif. Il n’a même pas soufflé un simple petit Merci… à la guerre comme à la guerre, je bois ma rage doublée de déception et pour l’image du pays hôte… je lui dis :

     -« Monsieur soyez le bienvenu en Tunisie ! »

     Que cette image d’une tendre enfance revienne si souvent dans mes rêves me laisse pantois et interrogatif. Cela a peut-être eu un effet inverse. Ce petit prof m’a peut-être rendu service.  Il m’aura apprit par sa désinvolte courtoisie deux choses au moins :

     -        Il aura contribué à mon fol amour d’aller vers l’Autre, d’aller chercher l’Autre, d’aller comprendre l’Autre, d’aller s’enrichir de la différence de l’autre.

    -        Il aura également contribué à me pousser à essayer de comprendre qu’il ne faut pas s’attendre que l’autre réagisse comme vous l’espérez et que s’il n’a été ni tendre, ni gentil c’est qu’il est peut être mal dans sa peau et même quelque part malheureux.

     Merci à ce coopérant français qui contribua à la confection de mon habit de voyageur et me prépara à mieux comprendre et adopter dans la vie de tous les jours : la compassion.

     L’enfant, plus que jamais est le père de l’homme !

  • Entre bleu Prusse et bleu indigo...

     Je perds la tête à Chefchaouan :)

     Ceuta. (sept 2011). Il est déjà sept heures, Ceuta s’éveille et je vais rentrer (à Tanger, puis à Casa) par le chemin des écoliers, empruntant les collines de l’Atlas à la recherche du Sidi Bou Saïd des montagnes marocaines, du village suspendu de Chefchaouen.

     maroc,chefcouane,bleu prusse,atlas,montagne

      Point de bus et point de taxis à la frontière de Ceuta

    C’est un jour férié religieux, la fête de l’Aïd et tout le monde semble rester en famille. Je n’ai plus qu’à reprendre mon plus vieux métier (du monde)… l’auto-stop. La 72e ou peut-être 80e voiture daigne enfin s’arrêter pour me déposer deux kilomètres plus loin à l’arrêt de bus ou de taxi pour la ville de Tetouan, à mi-chemin de Chefchaouen. 120 minutes d’attente d’un éventuel bus ou d’un hypothétique taxi pour me re-décider à reprendre mon stop. Echec et mat. La dernière astuce du voyageur est d’aller vers une station service, là où les conducteurs sont abordables. Dix, vingt, cinquante peut-être… Le 51eme, à la barbe fournie, à la chemise blanche immaculée et au regard malicieux me prend à bord de sa voiture et me raconte sa vie de vingt ans de travail à Madrid avant de devenir agent immobilier à Ceuta. A ma question : pourquoi les cinquante autres personnes ont refusé de me prendre à bord, il me répond, un peu gêné :

     -« Vous savez, tout le monde voit que vous sortez de Ceuta avec votre baluchon bleu, et les Marocains, en ce jour d’Aïd, préfèrent éviter les passeurs de drogue. »

     Au bout d’une longue heure de route, mon honorable barbu me dépose à la gare routière de Tétouan. Le Maroc se modernise et a décidé, depuis trois ans, de refaire toutes les gares ferroviaires et terrestres du royaume. Dans cette gare, mosaïques et jets d’eau font bon ménage et invitent à repos et évasion.

     Le bus est confortable et la première place assise vous donne l’impression d’être le conducteur de l’engin. L’Atlas est vaste et les routes sinueuses. Terminus. Une petite place, ou placette comme disent les Suisses, ceinte de bancs publics et faisant face à trois taxis bleus marquera  le début de la découverte du village de Chefchaouen.

    Le chauffeur de taxi me fera changer d’avis et de programme.

    Une heure, toute une heure de contemplation en pleine campagne, face à cette cascade ronronnante formée d’une impressionnante chute d’eau au creux de l’Atlas. La foule muette et médusée contemple la danse de l’eau et semble voguer sur ces vaguelettes et gouttelettes éparses et voyageuses.

     Je m’extirpe non sans difficulté de ce nirvana, à la recherche du centre ville. Ô ! Suis-je donc à Sidi Bou Saïd, le village bleu et blanc, à l’orée de Carthage ? Oui et non. Oui par le charme et la couleur ressemblante, et non par cette différence, et de poids, de l’histoire. 

    Imaginez-vous moult ruelles de deux mètres de large

     Sinueuses et généreuses, se frayant un chemin dans les gorges d’une colline où sont perchées et accrochées des centaines de petites maisons non pas bleues et blanches, mais bleu sur bleu. Ma maladie de voyageur reprend le dessus. J’ai envie. Envie de pénétrer… Le for intérieur voluptueux, mystérieux, avenant et… énigmatique d’une… de ces maisons. Ni une ni deux, me voici arpentant des escaliers chaulés de bleu marine qui, au bout de quinze marches, aboutissent devant une maison au bas habillée de bleu ciel ou bleu cobalt et au haut parée de bleu de Prusse. Point de sonnette, mais une lourde main de Fatma de bronze en guise de heurtoir. Une fois, deux fois, dix fois. Aucune réponse. Cinq gamins blondinets du haut de leurs cinq ans m’encerclent et se mettent à danser. Leurs rires vifs et joyeux me poussent à leur demander la façon de pénétrer dans cette maison fermée. Et à la plus jeune de me dire :

     « OK, je vais réveiller papa. »

      Sésame, ouvre-toi. L’hospitalité marocaine n’est pas un vain mot. Une pièce carrée de trois mètres de côté, avec trois banquettes circulaires et toute la famille venue entourer le voyageur qui vient de loin et qui voulait partager le verre de thé marocain à Chefchaouen. Une heure de bonheur dans cette famille de sept membres dont le fils ainé se convertit à la musique et au rap grâce à Facebook. Son rêve est d’aller à la conquête des planches à Tanger. Les petits gâteaux se suivent et ne se ressemblent pas. Ils paraissent tous reprendre l’histoire de ce village béni et oublié des dieux.

     Encaissée entre deux montagnes, à 620m d’altitude Chefchaouen est ainsi une insolite cité de 37 000 habitants aux maisons chaulées de bleu foncé et de bleu clair. Bleu sur bleu !

     Un charme puissant que l’on ressent intensément sur la place Outa-el-Hammam dans la médina pavée de galets. Assis à la terrasse d’un café, vous pouvez profiter de la belle vue sur la grande mosquée Tarik-Ben-Ziad dont le minaret octogonal est inspiré de celui de la Torre de Oro à Séville. Cette architecture andalouse se retrouve dans la Kasbah et ses jardins, au cœur de la médina. Ses murailles et ses onze tours crénelées, dont une servait de donjon, abritent un intéressant musée ethnographique. Les habitants ont la vie dure, aussi, les résidents appellent souvent Chefchaouen par son nom d'origine « Chaouen », qui signifie "sommets", en référence aux montagnes du Rif qui l'encerclent.

    Cela donnera : regardes les sommets ou Chouf Chaouan ! 

     Sous l'occupation espagnole, l'orthographe fut transformée en Xauen, avant que le nom Chefchaouen ("regarde les pics") soit adopté en 1975.

    Fondée en 1471 par Moulay Ali ben Rachid, comme base des tribus berbères du Rif, pour lancer les attaques contre les Portugais de Ceuta, Chefchaouen prit son essor à l'arrivée des réfugiés musulmans et juifs fuyant Grenade et les persécutions, après 1494.

     Ils bâtirent des maisons blanches à la chaux

      qui donnent au bourg son allure espagnole, avec leurs minuscules balcons, leurs toits de tuiles et leurs patios, au milieu desquels pousse généralement un citronnier.

    Le bleu pâle recouvrant les habitations, si typique aujourd'hui, fut introduit dans les années 1930 par la population juive. Cette couche devait remplacer le vert des fenêtres et des portes, couleur traditionnelle de l'Islam.

    La petite ville vécut recluse jusqu'à son occupation par les espagnols en 1920. Auparavant, les chrétiens étaient interdits d'accès, sous peine de mort. Deux d'entre eux réussirent toutefois à pénétrer dans le bourg : l'explorateur et religieux français Charles de Foucauld en 1883 et, cinq ans plus tard, le journaliste et voyageur Walter Harris (déguisé en juif).

     A leur arrivée, les Espagnols furent surpris d'entendre les habitants juifs parler une variante du castillan médiéval. Ils furent un temps chassés de Chefchaouen par Abd el-Karim, durant la rébellion rifaine des années 1920, puis y revinrent jusqu'à l'indépendance, en 1956.

     En plus du tissage, Chefchaouen est réputée pour sa vannerie et ses poteries. Poterie de Ghzaoua, et berradas (cruches à eau) ou une simple goulla (jarre). La visite des agadirs ou greniers collectifs fortifiés de la région s’impose également. Enfin, pas question de quitter la ville sans avoir goûté à son fromage blanc de chèvre des montagnes. C’est peut-être le meilleur du Maroc.

     Bercé de bleu, rêvant en bleu et tout bleu je m'extirpe de ce village de l'Atlas, pour reprendre la route de Tanger, puis de Casa, espérant rattraper mon vol sur Bangui, en République centrafricaine, pour découvrir - j'espère- les Pygmées oubliés et les singes au dos argentés... peu protégés!

     Vaya con Dios :)

     

  • Une si courte et belle nuit ...

     

    Une courte nuit chez Sir Churchill !

    Enfin, la vieille ville de Tanger, un véritable joyau royal. Les ruelles gardent leur âge tricentenaire et leur charme souvent médiéval. Les pâtisseries se suivent et se ressemblent. Chacune vous invite à déguster généreusement une Corne de gazelle, une savoureuse Chebakia ou encore  des Ghribas aux amandes, sans oublier les rituels Baklawas garantis cinq millions de calories.

    tourismania El Minzah hotel terrasse Tanger.jpg

    Entre deux ruelles blanches, en haut d’une colline

    une porte à moitié ouverte invite le passant par une simple affichette « Vous êtes chez vous ». Je pousse le battant de porte et plonge dans un salon de deux mètres carrés avec des dizaines de prospectus sur un minuscule bureau de 60 centimètres de long. Un jeune marocain d’un âge sans âge et d’un œil sans lumière me demande de faire mon choix.

    Je crois succomber au choix de faire offense à la rousse pour choisir la fausse blonde ou de laisser tomber la petite brune pour la grande noire d’ébène vêtue. Ni l’une ni l’autre, mon général ! Le jeune marocain semble me réveiller de mes fantasmes déplacés pour me demander quel prix je veux mettre.

    Mince… Euh… C’est donc un casino, et il me demande quelle sera ma mise, et je commence à chercher de grosses pièces au fond de mon portefeuille.

    Et le voilà qui me ramène à nouveau sur terre pour me demander si je la veux grande ou petite… Simple… ou double.

    Zut ! C’est simplement une maison d’hôtes qui vous offre trois minuscules gîtes.

    Surgit soudain de nulle part un septuagénaire bien en chair, dégoulinant de sueur, une cigarette au bec : « Je suis le capitaine Jacques, ancien officier de l’armée française et néanmoins propriétaire des lieux. Que puis-je pour vous, jeune homme ? ».

    Je me sauve sur la pointe des pieds, sur ces dalles blanches de Tanger, transformé en tapis volant d’Aladin le lointain. La journée d’évasion fut riche en mille et une aventures et il est temps d’affronter mon hôtel El Minzah et la promesse du chef de réception de m’offrir la suite 136, dite « Suite de Churchill ».

     

    L’établissement El Minzah Hotel se trouve au cœur de Tanger, tout près de la Place d'Espagne, American Legation et Dar el Makhzen. Il n’est pas non plus loin de Place de la Kasbah et Place de Tanger

    El Minzah est le plus ancien hôtel de Tanger, certaines parties de l'hôtel datent du XIX siècle, il a ouvert ses portes en 1930 par John Crichton-Stuart, le 4ème marquis de Bute.

    Au beau temps de Tanger l'internationale plusieurs célébrités du monde ont été hôtes de ce magnifique établissement : Churchill, Le roi Juan Carlos, Jean Claude Van Damme, Jacques Cousteau et plusieurs autres personnalités qui cherchaient un havre de paix unique à Tanger.

    L'hôtel dispose de 2 piscines et d'un centre de remise en forme et offre des vues panoramiques sur la baie. Son centre de bien-être comprend un sauna, un jacuzzi et un hammam et propose des soins du corps et des massages.

    Ô temps, suspends ton vol ! Le charme anglais est noyé dans la grâce marocaine entre lit à baldaquin et sofa de boudoir qui gardent encore les traces des somptueuses et ravissantes comtesses qui en furent les hôtesses. A peine sorti de ma douche, je suis attiré à ma fenêtre pour découvrir un large balcon mitoyen où trois jeunes dames sont en train de siffler champagne sur champagne avec éclats de rires et bonne humeur tonitruante. L’une d’elles me voit et crie : « C’est lui, c’est lui ! ».

    Et à la seconde de me dire dans un français châtié, teinté d’un léger accent britannique :  « Permettez-nous, Monsieur, de vous sortir de votre suite royale pour vous convier à notre modeste terrasse donnant sur le port de Tanger et vous inviter à fêter avec nous nos retrouvailles. Le maître d’hôtel nous a dit que vous seriez Voyageur. »

    Le hasard aura voulu qu’ayant tout fait pour être dans la suite de Churchill, je n’y resterai finalement que quelques minutes pour aller rejoindre un incroyable trio de jeunes dames marocaines hors du commun, qui du charme et de la grâce de la vie, connaissent tous les recoins.

    La première vit à Bruxelles et travaille au sein du Parlement européen, la seconde vit à Paris et de la mode  connait tout un rayon. Quant à la troisième qui n’arrête pas d’allumer cigarette sur cigarette, elle n’est autre que la gardienne de Céans qui protège en leurs absences les appartements de Tanger de ces deux dames qui ne rentrent au pays que deux semaines par an.

    Mais pourquoi ne sont-elles pas chez elles, et pourquoi sont-elles dans une suite au prestigieux hôtel El Minzah ?

    La réponse est simple. Nous sommes encore dans les jours de la fête sacrée de l’Aïd et en fuyant leurs maisons elles évitent leurs familles qui viendraient leur rendre visite.  Elles trouvent ici liberté d’action et boissons à gogo. Bières fraiches, Gin et champagne sont généreusement disséminés sur la table.

    A la quatrième coupe de champagne, le programme change. Ces dames acceptent… de téléphoner à deux autres de leurs amis Tangérois d’origine et écrivains reconnus. Une délicieuse soirée entrecoupée de vers et de prose et saluée par des verres pétillants. A chacun d’aller plus loin et à chacune d’être encore plus gaie et à tous de décider à cinq heures du matin d’aller plonger dans la piscine. Nos rires d’enfants ont dû réveiller la moitié de l’hôtel et tout ce monde se retrouve dans ma suite pour un chaud café et de croustillants croissants aux amandes…

     Il ne me reste plus que deux heures pour attraper mon train sur Casa