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  • Les Folies Bergères (6)

      BORA BORA ENFIN ? 

     

     En juin 2004, mon si dynamique et aimable gérant-pharmacien décide de prendre sa retraite à 45 ans, après 20 ans de très bons et loyaux services !

      En décembre de la même année mon comptable me propose déjà de déposer le bilan…

     Ce n’est qu’en juin 2005, une année plus tard, que je découvre le pot aux roses ! Depuis le départ de Si Khaled, mes six préparatrices et ma nouvelle pharmacienne, sans doute malheureuses par leur chariot vide ou pas trop plein, à Carrefour, décidèrent d’un commun accord de « dévaliser mon officine ! » Tout le monde y passa, même Sofiane, mon petit coursier aimé, pour lequel je venais d’acheter un petit appartement-studio (F+1) à El Mourouj… en guise de gratitude pour son travail…

    Le temps passe, le découvert bancaire est abyssal et les banques posent et apposent leurs vétos !

      Un téléphone anonyme réitéré d’une jeune dame du village finit au bout de deux jours de m’éclairer sur toutes les combines des filles, qui n’avaient plus un Si Khaled sur le dos ! Même la pharmacienne dont le mari est prescripteur, vendait ses échantillons et les troquait contre de la parapharmacie ! Bref c’était le désastre !

      Arriva enfin le début d’une preuve. LA faute. Police, enquêtes et insomnies. Le vol est dénoncé (sur une année) et le commissaire de police et les autorités d’inspections de travail sont mises au courant !

      Je ne déposerai aucune plainte. Tout le monde sera  simplement payé et remercié !

    Je demande à ma conscience trois jours de réflexion pour savoir comment me débarrasser de cette officine et, enfin, aller vivre dans mon île de Bora Bora, à 20 heures d’avion de mon village, d’apothicaire  !

    C’était sans compter sur la chaîne française de télévision TF1 !

    Un soir, sur cette chaîne. Un homme nous tient en haleine. J’attrape l’émission en route. Je ne sais plus si c’est le patron parisien du Lido, du Crazy Horse, des Folies bergères  ou du Moulin rouge mais son récit m’a remis sur selle !

      Il voulait vendre sa boite après tant de décennies de succès ! Des problèmes fiscaux ont miné sa vie et il n’arrive pas à s’en sortir ! En première phase il ferme sa boite parisienne, pour un certain temps, et part à New York !

      Un soir, il ne peut s’empêcher d’aller visiter un cabaret. Le premier cabaret de New York ! Très vite il demande à bavarder avec le jeune propriétaire pour le féliciter ! Ce dernier fera tout pour lui expliquer que ce cabaret américain n’arrivait à la cheville du célèbre cabaret parisien qui malheureusement est fermé depuis six mois ! Le Français se dévoila enfin, se présenta et l’Américain commanda une nouvelle bouteille de champagne bien français !

      Leur rencontre durera jusqu’à l’aube ! Jusqu’à la décision de reprendre le premier avion sur Paris et d’aller « sauver son cabaret »

      Face à mon téléviseur je me traite de lâche et fonds en larmes ! Seul !

      Pour des plumes du strass et des paillettes ce monsieur  redescend dans l’arène !

    Pour le si noble médicament et mes milliers de patients je mets la clef sous la porte pour  partir à Bora Bora?

    Non ! Trois fois non !

    Le lendemain matin, je vends un petit appartement à El-Menzah qui réglera  ainsi toutes les dettes de la pharmacie… qui 365 jours plus tard retrouvera ses lustres, son aura et sa fidèle mission humaniste et sociale au service de mon petit village et de ma petite famille !

      Adieu Bora Bora !

     

    (suite et fin : Les îles Salomon cette fois ?)

     

  • Non, mon Général! Euh…oui, mon Général ! (5)

    Intermède militaire

     

    Quand je suis rentré d'Australie pour m'installer en Tunisie, j'ai demandé avant d'ouvrir mon officine s'il était réellement obligatoire de faire son service militaire ?

    Face à une grande confusion et pour ne pas perdre du temps je suis allé au Ministère de la Défense Nationale... pour demander à faire volontairement et de suite mon service militaire !

    Personne ne voulait m'écouter et ils pensaient que....j'étais à moitié fou!
    Finalement, le 3e jour, un Lieutenant me reçoit, m'écoute, s'absente 5 minutes, revient et me fait grimper à l'étage supérieur...

    Petit, vif, espiègle, intelligent et surtout sérieux... le Général me demande:

    "
    Alors vous venez semer la zizanie chez nous?
    Vous ne pouvez pas attendre d'être appelé?"


    Je répondis sans réfléchir :

    - Non mon Général!
    - Oui mon Général! Mes respects mon Général! Mais je veux faire de suite mon service militaire obligatoire, pour être enfin libre de tout engagement...


    Le lendemain, j'étais affecté à l'hôpital militaire d'El Omrane, à Tunis même, avec un grade de Sous-lieutenant!
    Six mois plus tard, mon service militaire était terminé (présence uniquement  de 7h30 à 13h30 et je rentrais ensuite au bercail!)

    Mais, je n'étais pas d'accord à  « terminer ainsi » ce service dit militaire, sans avoir "touché une arme à feu"!

    Le célèbre Colonel ORL de l'hôpital, devenu aujourd'hui Général (et surtout ami) me reçoit et m'accorde une faveur:
    Départ demain à 6h00 pour la caserne militaire de Sousse! Entraînement militaire 10h/jour... et une vie de bidasse en folie...

    Un indélébile souvenir de la vie d’une bidasse à la rencontre des jeunes recrues venues d’horizons si divers et lointains ! Quelle riche expérience pour découvrir la réalité du pays après onze années en vavangue, en vadrouille !!

     De cette riche expérience je garde dans mon cœur et dans ma tête trois images intactes à part mon travail de « soldat volontaire » :

    1. Une maternité : Le second jour de mon service militaire, je me suis présenté à 8h du matin au service de gynécologie/maternité ! Je demandais sans vergogne au Gynéco de service :

    - Je souhaite voir et savoir comment je suis né ? Etait-ce bien dans un chou ou dans un nid de cigogne ?

    - Un petit problème jeune homme ! Vous n’avez pas de blouse verte !

    - Qu’à cela ne tienne, j’en vois une là à ce porte manteau !

    La destinée fera que non seulement j’assisterai ce jour à ma première naissance (à 8h20) avec le charmant Dr Lamine Méziou, mais le hasard fera que je serai plus tard, son assistant préféré pour l’accouchement de mes trois garçons !

    2. l’amitié entretenue et poursuivie, à ce jour, avec quatre officiers devenus généraux : Gl Hamadi Fayala, Gl Mohamed Gueddiche,  Gl Ben Moussa et le Gl  Ben Youssef !  

    3. Une trouvaille allemande : Un soir en fin de journée, dans la pharmacie externe que je dirigeais à cet hôpital militaire, je demandais à un soldat de me faire visiter la cave fermée !

    Destin quand tu nous tiens ! Vers minuit je quittais la caves les  yeux rouges de poussière et quatre pages pleines de graffitis !  

    Je venais de découvrir un véritable trésor d’Ali baba ! Lors des dernières inondations, l’Allemagne offrit à la Tunisie  plus de 50 gros cartons de médicaments ! Ces colis dorment ici, depuis, du sommeil des justes, victimes du barrage de la langue de Goethe !

    Le colonel de l’hôpital accepta ma doléance mais préféra m’envoyer au Ministère demander l’autorisation de distribution de ces médicaments ! Vif et intelligent, le général accepta que je traduise l’essentiel de tous les prospectus, que je trouve un équivalent de médicament tunisien et que je distribue une liste nominative et quantitative à tous les médecins prescripteurs de cet hôpital !

    Un petit trésor récupéré, de plus de 300 000 US dollars !                                    

                    ( Suite et fin : Les Iles Salomon ?)

  • SACREE PARTIE DE BELOTE (4)

    DESTIN EPISTOLAIRE

     

     La pièce est assez sombre et la fumée dense ! Les fumeurs sont coriaces et leurs taux d’adrénaline grimpent au ciel sur les pas de sieur Belot! C’est la finale d’un long tournoi de belote. Il est minuit ! Déjà !

    Le premier joueur annonce un carré ! Le second surenchérit par un autre carré ! Le troisième annonce une tierce (pour sauver l’honneur) tandis que le 4e annonce « Cinquante » !

     

     

    Une page de vie ! Une soirée amicale à Tunis ! Un tournoi hebdomadaire de belotte !

    Les quatre annonceurs optimistes pensent que les trois autres bluffent et qu’ils vont gagner !

    Maître Sauveur Bessis (qui traduisit le premier en Tunisie, en 1956, des textes juridiques du français à l’arabe), Marcel Moatti (ami d’enfance de la famille), Dr  Claude Uzan (Rue d’Espagne) et mon père !

    Destinée : Les annonces sont dévoilées ! Papa était sur de gagner avec 4 dames (qui lui portent souvent chance) et c’est le Dr Uzan qui rafle la mise avec 4 As !

    Un apéro et une discussion très amicale suivront ! Le Dr Uzan demande à mon père :

    -          Qu’est donc devenu ton fou de fils qui a déjà achevé ses études pharmacie en Suisse l’an passé ?

    -          Il a décidé de s’improviser correspondant du Figaro de Paris et  de la Feuille d’Avis de Lausanne en s’installant à Bora Bora, au large de Tahiti et en couvrant au fait, trois îles du Pacifique : l’Australie, la Nouvelle Zélande et Tahiti. Il est fou !

    -          Plus de onze ans d’études ( deux études)  pour abandonner ce garçon dans les îles ? Faudrait trouver un moyen de le ramener au bercail mon ami !

    Fumant son petit cigare et cajolant son petit scotch, égrené de pistaches croustillante, Marcel Moatti dit alors à mon père, sur un ton monocorde et fluet :

     

    -          Aziz, comme le monde est bizarre ! Ton fils ne se décide pas à rentrer au pays et le Dr Uzan et son épouse veulent quitter définitivement la Tunisie , pour s’installer à Paris ! Je sens qu’il y a une providence, un destin entre ces deux chemins contraires

    -          Oui, Marcel, on reparlera demain à l’usine ! ( la SAF , savonnerie de Mégrine)

    Destinée bis : Quinze jours plus tard, je reçois une énième lettre de mon père à Sydney, chez une amie médecin, que je rencontre une à deux fois par mois, selon mes déplacements et qui a la gentillesse de canaliser mon courrier !

    Cette lettre était comme les précédentes ! Une montagne d’amour, d’Amour et encore d’Amour ! Juste un certain reproche qui n’en est pas un… « Penses un jour à revenir chez nous, tu nous manque. Ton père qui t’aime ! »

    Je lis toujours ce passage avec rapidité pour ne pas fondre en larmes et me torturer encore plus !

    Mais cette lettre avait un plus ! Un Nota Bene !

    NB. « Je t’ai acheté une pharmacie à Ben Arous ! La vieille pharmacie du Dr Rivca Scialom (juive Russe) épouse du Dr Claude Uzan ! »

    PS. 48 heures après réception de cette lettre je me suis décidé à rentrer enfin en Tunisie !

     

           Puisse un jour mon Père, mon Dieu sur Terre, le Premier de mes amis, écouter de loin mon murmure de    gratitude, d'Amour et de fidèleté à toutes ses valeurs humaines! Je t'aime Papa! Je t'aime!

                                  (Suite : Destin militaire forcé)

  • Tentative hélvète (3)

     DESTIN LAUSANNOIS

     

    Me voilà déjà à Lausanne, 24 heures après mon retour définitif en Tunisie !

    Une nuit chez l’aimable logeuse (grincheuse) de mon père à Lausanne !

    Armé d’une petite feuille avec un nom et une adresse (Professeur Girardet, Faculté de pharmacie, place du château) je sorti très tôt pour déambuler dans ces petites rues en toboggan ! Ici, le plat pays de Cologne fait place à une jolie ville en collines ou tout semble être peint, repeint, astiqué et nettoyé la veille !

    Il est déjà 9h00 et ce Dieu curieux appelé Hasard, le dieu des voyageurs, me guide face à une belle officine : la pharmacie du Théâtre, face au théâtre de Lausanne ! Une force mystérieuse m’aspira dans cet antre !

    Est-ce ma future profession ? La belle façade ? Le luxe du lieu ? Que sais-je encore ?

    Là, un silence à couper au couteau sépare une dizaine de clients aux quatre préparatrices (ou nones) en blouse blanche ! Chacun son tour calmement !

    Je regardais ce curieux manège et pensais à cet air aseptisé de ma nouvelle Suisse !

    Quand soudain un regard vert langoureux me ramena vers mon lagon de Bora Bora au large de Tahiti ! Elle avait déjà 30 ans et portait le blanc avec aisance et coquetterie ! Son chapeau beige accentuait son aura et attisait ma curiosité ! Futur petit étudiant (peut-être) à Lausanne je n’avais pas l’ombre de la chance d’une chance avec cette dame au saphir rutilant !

    LA providence débarque ! Le voyageur retrouve ses mots !

    Personne n’arrive à comprendre cette majestueuse et élégante cliente qui ne parlait… qu’allemand !  

    Sans trop réfléchir, je glisse derrière le comptoir et lui demande sans vergogne «  Wie kann ich Ihnen helfen Madame ? Ou, comment puis-je vous aider  Madame? »

    La vente plus facile ! Elle avait besoin d’un produit cosmétique qu’elle me montra du doigt sur un rayon jaune ! Sans gène aucune, j’attrape le produit, le glisse dans un sachet vert au nom du Dr Jean Pierre Rhein et la conduit courtoisement à la caisse, en la remerciant !

    Les quatre vendeuses ou préparatrices sont médusées et appellent délicatement de l’aide !

    Un intrus est dans la boite !

    Lunette d’écailles vissées au nez, petite moustache et œil sévère, l’Apothicaire me foudroie du regard et comprend toute la situation en une fraction de seconde ! La cliente sortie il me somme de le suivre dans son antre de bureau !

    -         Vous faites quoi en Suisse vous, pour servir si vite une cliente dans un lieu qui est étranger?

    -         Voyez vous Monsieur, j’ai simplement voulu me rendre utile et traduire le souhait de la cliente à votre personnel !

    -         Aha ! Aha ! Ok ! Et vous faites quoi en Suisse ?

    -         Euh… à vraie dire nous sommes peut-être un peu collègues !

    -         Dans ce cas on dit confrère mon petit !

    Son regard change, sa méfiance s’émousse et il commence à prendre l’intrus en sympathie !

    -         Et vous êtes déjà en quatrième, cinquième année ou en déjà au final ?

    -         A vrai dire Monsieur, je suis à Lausanne depuis hier soir, je loge à l’autre bout de la rue et je vais chez le Dr Girardet pour m’inscrire en pharmacie !

    Il voit rouge ! Il devient bleu ! Il crie et hurle : comment ! Vous n’êtes même pas étudiant en pharmacie et vous entrez chez moi comme dans un moulin et vous allez même jusqu’à vendre un produit à une cliente !!!

    Je ne savais plus comment boire ma honte ! Mais ! Mais ce monsieur me paraissait si attachant sous son air fougueux. Le voilà soudain qui décroche le téléphone et compose un numéro !

     Ce que je vais entendre changera mon destin. Encore une fois !

    -         Professeur Girardet, tenez vous bien, j’ai ici, dans ma pharmacie, un jeune maigrichon de Tunisien, qui prétend venir s’inscrire chez vous ce matin !

    -         Ah  bon…….. ! Oui, c’est ce qu’il me semblait. Les délais sont dépassés depuis deux mois et les cours comment déjà lundi !

    -         Ah bon ! Vous n’avez aucun rendez-vous  avec ce jeune ?

    -         Professeur, quelque chose me dit que vous devez le recevoir….

          Suit un long silence… le verdict du Directeur de l’Ecole de pharmacie Lausanne.

    -         Oui, c’est d’accord il viendra de ma part avec une feuille officielle et mon cachet !

    Dr Rhein me demande alors mon identité, rédige un petit mot avec un stylo à plume noire, le glisse dans une enveloppe blanche (qui me rappelle le vol SR242) et me la tend en me disant : « bonne chance petit ! Le directeur vous reçoit dans 30 minutes ! »

    Grand, placide, sans expression aucune, d’un âge avancé et peu disert monsieur Girardet  me reçoit au 4 place du Château, dans son petit bureau couvert et recouvert de vieux livres !  

    -Dites moi mon petit, comment avez-vous fais pour avoir l’appui et l’aval de mon ami le Dr Jean Pierre Rhein, Président du Conseil de l’Ordre des Pharmaciens du Canton de Vaud ?

    Merci Bouddha ! C’est encore le destin et le « hasard-providence » qui me sauvèrent !

    Ce n’est pas la peine de chercher le chas de l’aiguille ! Moins de 48 heures après mon retour définitif en Tunisie, je suis officiellement inscrit à la Faculté de pharmacie de Lausanne, avec le droit de rentrer trois jours à Tunis pour préparer ma valise de « départ-arrivée-départ ».

    Ce que le destin a tracé est encore plus complexe !

    Après son doctorat, va-t-il rentrer ou reprendre les routes du monde ?

    Sept ans plus tard : quatre adultes jouent une dernière partie de belotte, à minuit, à Tunis…

    (@suivre : un carré d’as qui change la trajectoire d’un voyageur au Pacifique Sud)