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guinée

  • Un restaurant bien particulier… (9e, fin!)

    Resto-couloir

     .

    Le dernier soir de notre séjour guinéen se veut familial. Monsieur le ministre des Affaires étrangères nous invite à dîner au restaurant de son épouse.

    L’entrée se fait par la porte du garage. Ce garage se transforme soudainement en couloir interminable, parsemé d’une dizaine de tables rondes bordées de chaises en plastique blanc. La table d’honneur nous est attribuée et je me fais un devoir d’inviter le fils aîné du diplomate auprès de nous. Tantôt au four, tantôt auprès de ses clients, madame l’épouse du ministre a un gentil mot pour tous ses convives. La lumière est blafarde et les mets épicés et délicieux. Les brochettes de poisson sont royales sans gravitude aucune et les pommes frites plus françaises que les belges.

    Un inoubliable dîner qui en plus nous sera servi avec 20 % de réduction.

    Les temps sont durs et quand on est un haut commis de l’Etat non corrompu on préfère arrondir ses fins de mois en faisant travailler son épouse au four et au couloir…

     

    Adieu Guinée Bissau. Adieu terre de cajou, de crevettes, de pauvreté, de misère et de détresse. Quarante ans de guerre sont déjà de l’histoire ancienne. Une génération nouvelle décide de reprendre le pays en main et de l’imbriquer dans le cortège des nations.

     

    Puisse votre volonté et votre amour du pays sortir cette si belle Guinée Bissau de son gouffre profond, l’ouvrir au monde et savoir enfin la gérer avec éthique et raison !  

    R.T.

     

  • Le Rottweiler de Bissau (7)

    Un Rottweiler

    libanais

    en Guinée

     

    Dans ma vie de voyageur, ma seule réelle extase, joie et plaisir est et restera le contact avec l’Autre. Que n’ai-je fait pour entrer chez telle ou telle personne ? Que n’ai-je imaginé pour découvrir le giron de l’autre. A chaque fois, la découverte d’un personnage, d’une famille, d’une maison ou d’une maisonnée est un voyage gravé en lettres d’or dans ma mémoire de baroudeur.

    Tout cela me vient sûrement de mes 16/20 ans où j’ai eu la joie de découvrir 53 pays en auto-stop. Faire de l’auto-stop, parler certaines langues et avoir très peu d’argent, implique la prolongation du stop par un séjour, même furtif, chez le propriétaire du véhicule. « Enfant, père de l’homme » certes, enfant je suis et je resterai, à découvrir les yeux écarquillées « la vie de l’autre » et la chance m’a toujours souri.

    Même cette nuit à Trinidad et Tobago où, arrivés avec cinq heures de retard, nous eûmes droit à zéro taxi, zéro bus et zéro navette pour quitter l’aéroport et rejoindre la ville à quatre heures du matin. Soudain, il s’avança.

    Son pistolet pendouillait sur son côté gauche et son chapeau cachait ses yeux. Son étoile d’officier de police brillait sur sa poitrine et son alcool sentait à quelques kilomètres. Apprenant notre petit drame, il nous propose tout de go de venir passer la nuit chez lui. Une heure plus tard, la maison de notre hôte commençait à recevoir des cow boys hirsutes, maléfiques et bien louches. Sommes-nous dans un centre de vente de blanche, de traite de blanches ou de simples contre bandes ? Une seule issue à ce manège, boire un bon café et passer la nuit, éveillés, auprès de cette faune insolite et incroyable.

    Ici à Bissau, la fièvre de l’autre, la curiosité du gîte de l’autre et l’envie de découvrir l’antre de la boutique, nous pousse encore une fois à sonner à la porte d’une belle villa.

    Deux voitures immatriculées en Suisse, une blanche Mercedes et une noire BMW jurent avec le cadre guinéen. Je ne peux m’empêcher de chercher à savoir qui habite cette baraque. Alex a beau me freiner, mais mon pouce trouve rapidement le chemin du bouton de la sonnette. Une jeune demoiselle de 16 ans, toute de rouge vêtue, me reçoit dans un salon ventilé et ombragé. Son papa libanais est un des plus gros hommes d’affaires du pays. La pêche est sa chasse gardée.

    En sortant de cette maison, deux Rottweiler puissants attirent le regard d’Alex.

    Nous voilà installés dans la maison d’en face, face à deux bières locales bien fraîches et savoureuses. Amine et John, deux cousins libanais, vivent entre Dakar, au Sénégal voisin, et Bissau. Ils font commerce de tout bois et vendent à ce pays toute bricole indispensable, de la torche électrique au réfrigérateur en passant par les tables et les lecteurs de cassettes. Ces jeunes Libanais de 25 ans sont la représentation même de la diaspora libanaise qui envahit le continent. Aujourd’hui, la majorité des commerces africains sont pris en main par les Libanais. Ils raflent tout, prennent tout et réussissent en tout. Phéniciens plus que jamais, ils gèrent tout un continent.

    Que dire de ce petit Liban qui vient d’avoir une amorce de dialogue en juillet 2007 à Paris pour retrouver une paix oubliée ? Que dire d’un petit pays de 10 000 km² et de 3,5 millions d’habitants, dont la seule diaspora brésilienne compte plus de 6 millions de libanais ? Imaginez le reste…

    Demain est un autre. Le jour d’un plongeon médical…

                                                                                                                         (A Suivre)
  • Il est minuit. Un homme s’avance… (5)

    BISSAU BY NIGHT

     

    Il est minuit. L’heure du crime. Un homme s’avance un couteau à la main… pour… étendre du beurre sur un morceau de pain.

    Mais en Guinée Bissau, parler de beurre et de pain est déjà un luxe. A minuit, on parle plutôt de sécurité. A minuit, Alex et moi-même décidâmes d’un commun accord de regagner nos pénates !

    Une heure du matin. Un léger bruit suivi du choc d’une chaise qui tombe et me voilà attrapant sous le faisceau de lumière qui jaillit de ma torche, le fauteur de troubles. L’intrus. Celui qui osa pénétrer dans notre chambre. Sortant d’un sommeil profond et d’une fatigue certaine après une première tumultueuse journée à Bissau, mes paupières se font lourdes et ma cornée peu transparente.

    Le fantôme qui vacille sous ma torche électrique est très curieux. Il ne sort pas des châteaux hantés de l’Ecosse profonde, ni du désert du Néguev, ni de la tumultueuse Amazonie. Chemise blanche impeccable, pantalon crème fraîchement repassé et chaussures vernies, le gentleman cambrioleur a en plus un sourire narquois.

    Il eusse fallusse que je le susse (du verbe savoir) que ce jeune homme n’était autre qu’Alex mon compagnon de route.

    Narguant le couvre feu, les centaines de kalachnikov qui se baladent dans la ville, les milliers de pistolets vendus sous le bras, les guet-apens pour cinq maudits dollars, Alex décide de vivre son Bissau by night. J’ai dû dire et répéter qu’il fallait faire attention et éviter les rues sombres. J’ai passé les deux plus longues heures de ma vie qui me rappelèrent un autre calvaire de cent minutes avec un autre compagnon de voyage.

     C’était il y a quatre ans à Séoul. Nous rentrions de Chengdu, la capitale de la province du Sichuan en Chine. Dans cette mégalopole de près de 12 millions d’habitants à plus de 12 heures de train de Pékin, nous avons assistés pendant une semaine à une longue et incroyable procession bouddhiste ! Un régal de l’âme et du cœur !

    Une escale coréenne pour oublier la fatigue et découvrir plus tard la jeune héritière de la maison Samsung, dont la maman voudra…embarquer Nan ! Tout un poème !

    Notre nouvel hôtel de Séoul tombe à pic pour réparer les affres et fatigues de notre pèlerinage, dans des conditions rudimentaires et ecclésiastiquement bouddhistes !

    On avait par le pur hasard des voyages la plus belle suite de l’executive floor du Hilton Séoul à un prix défiant toute concurrence. Nan, mon fils et mon Body guard, perché sur son mètre quatre vingt quatorze, une casquette vissée sur la tête, décida à une heure du matin de rejoindre le quartier des GI américains dans les chaudes rues de Séoul.

    Rien n’y fit. Aussi obstiné que son aîné, il me quitta pour aller vivre deux heures de folie et d’aventure qu’il gardera dans ses souvenirs profonds…

    A demain au sein d’un gouffre humain…

                                                                (@ suivre)

  • Arrivée en Guinée(2)

    Bissau du bout du monde

    L’arrivée guinéenne commence par un problème de taille. Le logement. Comment trouver toit et fourchette dans un pays qui ne connaît qu’un seul et unique hôtel pour hommes d’affaires et diplomates de tous poils où la plus petite chambre coûte autant que le salaire annuel d’un autochtone ?  

    Refusant de nous faire plumer à l’arrivée, nous demandons à notre charmant hôte de nous faire visiter le centre ville pour y dénicher un éventuel logement. Aussitôt dit aussitôt fait, nous voilà reçus par un quinquagénaire de 120 Kg, ancré dans un bureau de 3 m². Les livres, factures, cahiers et carnets se chevauchent, s’imbriquent et arrivent même à garder un certain équilibre malgré une hauteur de 60 centimètres. Le clou de ce bureau est un ordinateur portable qui doit être le dernier gadget du pays. La page bleue de Microsoft ignore les frontières de la Guinée Bissau et s’implante derechef chez notre libanais propriétaire du grand hôtel de Bissau riche de cinq chambres.

    La suite royale numéro 1 nous est allouée pour la modique somme de 40 dollars la nuit, soit à peine deux mois de salaire d’un ouvrier... Deux petits lits avec un matelas en mousse trônent dans une chambre bien vide. Le plafond est bas et les murs, délabrés. L’humidité tropicale dotera ces mêmes murs de précieuses sources thermales. Champignons et moisissures se bousculent au portillon. L’insolite est certes la salle de bain. Une énorme pièce de dix m², toute de faïence blanche vêtue. Au fond, un pommeau de douche se lamente tristement pendu à un vieux caoutchouc qui du gruyère a toute l’apparenté. A l’autre bout de cette pièce, un évier aussi blanc que neige (oh miracle !) attendra vos ablutions matinales et vous évitera faute de glace ou de miroir de voir votre mine fatiguée. Luxe suprême, un petit paillasson d’osier se veut la seule et unique décoration de notre chambre d’hôtel dite suite royale n°01 !  

    Qu’est ce qui rend la Guinée Bissau aussi pauvre et si délabrée ?

    (@ suivre)